Another Sunday Morning... ___* [PV : Mon "cher et tendre" mari]

Une sirène d'ambulance réveilla Maddison en sursaut. Elle avait beau habiter New York depuis bientôt quatre ans, il y avait des choses auxquelles elle n'arrivait pas à s'habituer et cela en faisait partie. La jeune femme grogna, releva la tête pour voir son réveil et constata qu'il était 9 h 00 passées. Au moins, elle n'avait pas été réveillée en plein milieu de la nuit, comme ça arrivait parfois. Elle se retourna et vit que l'autre côté du lit n'était pas - encore une fois - défait. Pourtant, elle savait que Jackson n'avait pas découché, puisque vers 1 heure, lorsqu'elle s'était réveillée pour boire un peu d'eau, elle l'avait entendu pianoter sur son ordinateur portable depuis le salon. Il avait du y passer la nuit. Maddy n'y voyait pas grand-chose à redire : depuis qu'ils étaient mariés (brr, quand elle y repensait...), ils avaient le moins possible partagés le lit conjugual. Et c'était sans doute mieux comme ça.

Maddison repoussa le drap, s'enveloppa dans le kimono rose que son père lui avait offert pour ses 18 ans (un des rares vestiges de sa vie londonnienne) et d'un pas nonchalant, se dirigea vers la salle de bains. Elle prit une douche, savourant l'effet de l'eau chaude sur sa peau et sortie de la cabine, s'enroula dans une serviette-éponge. Pieds nus, elle sortit de la chambre et alla vers la cuisine. Dans le salon, Jackson était assis sur un fauteuil, son portable posé en face de lui sur la table basse. Il ne releva pas la tête quand elle entra. Maddison ne lui adressa pas la moindre parole. Elle attrapa la bouilloire, la remplit d'eau, la plaça sur la plaque vitrocéramique et attendit qu'elle siffle. Dieu merci, en ce dimanche, elle n'était pas obligée d'aller travailler. Elle qui avait vécue une enfance dorée sans jamais manquer de rien, cela avait été un rude coup quand, après avoir dépenser une grosse partie de l'argent laissé par son père sa mort, elle avait compris que pour vivre, elle allait devoir faire comme la majorité des gens : travailler. Elle avait d'abord été danseuse dans un bar dans SoHo. Puisque lorsqu'elle avait débarqué à Manhattan, elle avait trouvé un job de vendeuse dans un magasin de vêtements. Oh, le boulot n'était pas trop mal, et puis elle avait des réductions sur les fringues, mais elle, Maddison Holland, obligée de travailler et de satisfaire aux besoins d'une clientèle toujours plus insistante, c'était presque inconcevable.

Morisson, plus Holland. Elle était Maddison Morisson, maintenant, même si elle avait de plus en plus de mal à se faire à l'idée. Qu'est-ce qu'il lui avait pris d'accepter ? Oh, elle le savait bien. Déjà, elle était tombée enceinte. Ce n'était pas une raison pour se marier, certes, mais quand Jackson lui avait fait sa demande - une demande tout ce qu'il y avait de pas romantique, d'ailleurs -, eh bien, après mûre réflexion, elle avait dit oui. S'il lui était resté assez de son héritage, elle aurait certainement avorté, aurait refusé et l'histoire en serait restée là. Mais l'argent, avec son minable salaire de vendeuse, lui faisait défaut, et pour Maddison, c'était une manière ou une autre de s'en sortir. Et puis, elle avait hâte de quitter son minable petit studio et l'appartement de Jackson était vraiment attrayant. Alors voilà, ils s'étaient mariés. Et depuis, elle le regrettait chaque jour. Surtout que depuis qu'elle avait perdu le bébé, rien, mais vraiment rien ne la retenait. Jackson devait penser la même chose. Déjà, ils faisaient le plus souvent chambre à part (quand il rentrait la nuit) et leurs conversations se réduisaient au stricte minimum. La meilleure solution aurait été qu'ils se séparent, mais ils étaient beaucoup trop fiers tous les deux pour admettre qu'ils avaient fait une erreur. Alors ils subissaient la situation. Enfin, de son côté, Maddy n'hésitait pas à aller se consoler dans d'autres bras, et elle se doutait bien qu'il en était de même du côté de Jackson. Mais ça, elle ne voulait pas le savoir.

La bouilloire siffla et elle se versa un thé dans un mug. Puis, elle se dirigea vers le salon et s'assit dans le fauteuil en face de celui de Jackson, de l'autre côté de la table basse. Elle attrapa le dernier "Vogue" qui traînait et les pieds posés sur la table, elle commença à le feuilleter en savourant son thé. Son mari continuait à travailler sur son ordinateur. Le silence était total dans l'appartement. Soudain, elle releva la tête, se rappelant de quelque chose.

- Au fait, chéri...

Le dernier mot avait été prononcé avec toute l'ironie dont elle était capable.

- ...j'ai eu le propriétaire au téléphone, hier, et le loyer va être augmenté. Tu passeras à la banque faire le nécessaire,

ajouta-t-elle avec un geste de la main signifiant que ça ne l'intéressait pas du tout.

Elle reprit sa lecture. Cette petite robe rouge, là, page 25, était un pur délice. Si seulement...

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